Catégorie : Edito

Risques de la photo de rue

Il y a quelques semaines, profitant d’un séjour à Paris, je jouais les touristes déambulant dans les rues, appareil photo en main. Boulevard du Temple, une partie du large trottoir était encombrée par un déballage digne d’un vide-grenier. Je compris aussitôt qu’il s’agissait d’art moderne, une de ces installations dont raffolent les plasticiens. L’artiste avait disposé une série d’objets hétéroclites sur le macadam : une poussette de marché renversée, quelques vêtements éparpillés, deux sacs à dos de routards, une bouteille de vin blanc non entamée mais couchée, une couverture grise à bandes rouges. Il avait également peint à même le sol quelques taches à l’aide de peinture rouge-brun. Probablement pour éviter le piétinement de l’œuvre, la zone de quelques mètres carrés était entourée d’un ruban de plastique strié de rouge et blanc sur lequel se répétait à espace régulier l’inscription “POLICE NATIONALE”.
J’avais à peine relâché le déclencheur après avoir pris un premier cliché qu’un beuglement “WOOOOOO…..” poussé dans mon dos me fit presque sursauter. Braillement aussitôt suivi d’une supplique tonitruante : “Monsieur, veuillez aller voir plus loin, s’il vous plaît !”. L’auteur de ce vacarme était un individu que je n’avais pas remarqué auparavant, posté à quelques pas de la scène. Entièrement vêtu de bleu foncé, coiffé d’une casquette de la même couleur, il avait la ceinture ornée de divers accessoires et arborait un air féroce.
Outré de cette prise à partie, je lui fis vivement part de mon étonnement quant à sa manière de s’adresser aux passants. Je m’apprêtai à lui demander de plus amples explications sur son comportement agressif, quand la petite voix de la sagesse (ou peut-être de la lâcheté, car l’individu était grand et avait vraiment l’air très méchant) me conseilla de continuer mon chemin sans plus tenir compte de l’importun.
Reprenant donc ma promenade un moment interrompue, je me perdais en conjectures sur les raisons de ce courroux aussi violent qu’inattendu. J’avais juste photographié une scène insolite, je n’avais apporté aucun dérangement à l’œuvre exposée, émis aucune critique à son propos.
Quelques jours plus tard j’étais de retour dans ma province avec mes interrogations. Et finalement, la lumière a jailli, bien longtemps après les évènements. L’individu hurleur était l’artiste en personne. Il craignait certainement de voir ses droits d’auteur bafoués par une large diffusion de l’image de son chef d’œuvre sur les réseaux sociaux et voulait protéger le produit de sa créativité.
Leçon à tirer de cette mésaventure : si vous souhaitez photographier une œuvre d’art, assurez-vous d’abord que son auteur n’est pas dans les parages, ou demandez lui l’autorisation au préalable.

Louis DUPRE

Acheter des livres photo et non du matériel

Il y a quelque temps je lisais un article dont le titre était : Acheter des livres photo et non du matériel

Sur le coup, cela m’a semblé curieux, mais en y réfléchissant bien, qu’est ce qui fait un bon photographe ?

Est-ce le matériel ?

Quel est l’intérêt d’avoir le dernier modèle de boîtier, le plus cher, le plus performant, celui qui sera démodé dans six mois, (avec un peu de chance, sinon, cela sera peut être encore plus rapide) si l’on est incapable de trouver le bon sujet, de voir quel est le bon cadrage, d’apprécier la bonne lumière ?

Ou est-ce l’idée ? La vision des choses.

Est-ce que l’idée est innée, ou est-ce que la connaissance donne l’idée ?

Pour certains c’est inné, cela s’appelle le génie.

Mais si tout le monde était « génial » cela se saurait et puis quel ennui de ne rien avoir à apprendre.

Si la photo ne donne pas à celui qui la regarde du plaisir, une envie de s’attarder, de se promener à l’intérieur ou bien de se poser des questions, si elle n’exprime rien, Photoshop et compères ne pourront la transformer, car ils ne peuvent donner un intérêt à quelque chose qui n’en a pas. La post production ne règle pas tout, même s’il est souvent utile de s’en servir pour accentuer certaines choses, ou bien en gommer d’autres.

Et comment acquérir cet esprit ? Cette vision des choses ?

Quand on apprend à peindre on passe beaucoup de temps à étudier les maîtres de la peinture.

On recopie inlassablement des œuvres connues ou pas, jusqu’à ce que la main puisse faire ce que le cerveau lui commande, on apprend ainsi la technique.

Puis on en arrive à oublier le pinceau et l’on peut se focaliser sur le sujet, mais entre temps, en travaillant sur les œuvres de grands peintres, on a vu comment une composition peut changer l’image, même le sens de la perception de ce qui est représenté.

Ne peut-on faire la même chose en photographie ? En arriver à oublier la technique, pour pouvoir créer.

La chance qui va permettre la photo parfaite, n‘est qu’une illusion, la chance cela se travaille.

Combien de grands photographes ont travaillé pour en fait créer, oui, composer l’image qu’ils souhaitaient ? Ces images qui semblent pourtant complètement dues au hasard, d’un naturel parfait.

Même si on tient un sujet, il est parfois nécessaire de faire et refaire les photos jusqu’à obtenir ce qui est souhaité.

La photographie demande du temps.

Je ne parlerai pas de la photo dite de reportage, qui est quelque chose de particulier et comme l’on a pu le voir dernièrement avec la présentation de Charles, peut être aussi réinterprétée par le photographe lui-même.

Comment se procurer cette vision de la photographie, que l’on souhaite posséder, avant d’appuyer sur le bouton ?

Au début de la photographie beaucoup se sont inspirés de la peinture. Effets croisés, certains peintres se sont aussi, d’ailleurs essayé, plus ou moins longtemps à la photo comme Edgar Degas, d’autres comme Daguerre sont plus connus par leurs photos que par leurs peintures. Corot pratiquait la photographie sur plaques de verre au collodion (depuis Léonard de Vinci et son principe de camera obscura, les peintres utilisèrent régulièrement cet appareil mais ce n’était qu’un moyen pas une fin).

Pour les photographes amateurs, n’est-ce pas en regardant ce qu’ont fait les artistes photographes, que ce soient ceux du début de la photo, aussi bien que les nouveaux photographes contemporains, qu’il y a une possibilité de s’ouvrir l’esprit et d’apprendre.

On peut s’essayer à améliorer sa technique photographique en reproduisant certaines photos qui nous ont particulièrement plu.

Apprendre ainsi, puis ne plus penser à la technique et se lancer à photographier avec tout ce que l’on a appris plus ou moins consciemment sur la lumière, la composition, sans pour autant, faire uniquement de la copie, car si cela peut être parfois considéré comme une forme d’hommage, il faut être un grand pour se permettre cela, si non, c’est juste du plagiat.

Nous avons la chance d’avoir plein de galeries autour de nous, pas si loin, à Lannion, Guingamp, Brest, où de très nombreuses expositions photographiques sont présentées. En les visitant, nous pouvons nous ouvrir l’esprit sur divers styles de photos.

Et si l’on ne peut aller les voir, on peut néanmoins regarder les reproductions dans les livres, (dans notre bibliothèque, à la médiathèque) sur Internet, partout, regardons, apprenons ce que les autres ont fait avant nous. Bien sûr, sur Internet l’on parle de vrais photographes, pas de ces diaporamas d’amateurs que nous voyons passer, mais bien des portfolios d’artistes que l’on peut regarder à loisir sur leurs sites.

Ouvrons-nous l’esprit, peut-être qu’en apprenant des autres, l’on pourra se forger une vision propre et un propre style photographique …

Une vie après Photoshop ?

Notre stage Photoshop de 2004. Pas de vidéoprojecteur, très peu de portables ; l’essentiel du matériel est prêté par le CNET.

 

Cela va bientôt faire vingt ans que le club a commencé à s’intéresser à la photo numérique et à faire des formations sur Photoshop. Pourquoi Photoshop ? Quand nous avions commencé (97-98), il n’y avait guère le choix. Il fallait :

  • des possibilités très étendues pour la retouche et le montage (plus précisément, une bonne implémentation des corrections par courbes et de bonnes fonctions de sélection pour des retouches localisées) ;
  • un fonctionnement à la fois sur MacOS et sur Windows ;
  • un fonctionnement le plus poussé possible en retouche non destructive.

Un peu plus tard, une bonne gestion de la couleur est venue s’ajouter à ce cahier des charges. Bref, il n’y avait pas d’alternative.

Le logiciel était très coûteux, mais on pouvait l’obtenir à moindre prix. Pendant quelque temps, une version allégée a été distribuée en prime avec divers scanners à plat, version qui donnait accès ensuite au produit complet au prix d’une simple mise à jour ; ensuite, on pouvait très bien travailler en ne faisant qu’une mise à jour sur trois. Ça restait coûteux, mais raisonnablement — la photo était encore un loisir onéreux. Cette voie d’accès à Photoshop s’est fermée quand Adobe a arrêté sa version allégée au profit de Photoshop Elements, une version réduite destinée au plus grand nombre, mais avec de grosses lacunes en retouche interdisant tout travail poussé sur les images (entre autres, ni courbes ni masques de fusion), et surtout sans possibilité de passage à la version complète. La situation s’est débloquée plus tard (2010) quand la Fédé a obtenu l’accès au tarif pédagogique pratiqué par Adobe — en gros, tous les prix étaient divisés par 4, y compris les mises à jour. De 2010 à 2015, pas moins de 75 de nos membres ont ainsi acheté une licence légale pour Photoshop.

Même pudiquement, il faut tout de même dire un mot de la période intermédiaire, où certains de nos membres ont trouvé des Photoshop pour beaucoup moins cher. Le club n’a jamais encouragé les pratiques douteuses, mais il est clair que certains de nos membres bien informés des recoins cachés du web ont pu secourir d’autres membres peu au fait de ces pratiques.

Cet état des choses s’est fissuré en 2015 quand Adobe a cessé de vendre ses logiciels pour les louer mois par mois. Sa proposition s’accompagnait d’avantages considérables : des tarifs beaucoup plus bas — en gros le tarif pédagogique pour tout le monde, davantage encore si on prenait d’autres logiciels comme Illustrator ou InDesign — et des mises à jour permanentes sans supplément de prix. A titre indicatif, Adobe propose actuellement le couple Photoshop + Lightroom pour 12€ par mois. Ce n’est objectivement pas cher, mais ça s’ajoute aux abonnements de toute nature, pour la musique, pour le cinéma, pour les logiciels Microsoft, etc. Il n’y a plus de tarif pédagogique. La Fédé a bien obtenu une petite ristourne mais l’adhésion à la Fédé coûte plus cher que cette ristourne.

La pierre d’achoppement est que ces logiciels loués cessent de fonctionner quand on arrête de payer. Cela n’arrêtera pas l’adhérent profondément accro qui n’envisage pas un instant de vivre sans photographier et sans retravailler ses photos ; il y a bien le risque que l’entreprise Adobe disparaisse, sans qu’on sache ce qui arriverait ensuite, mais ce n’est pas demain la veille. Le problème concerne tous les débutants qui viennent passer quelques années au club pour apprendre à maîtriser leurs photos et à les travailler et qui ne savent pas vers quoi ils se tourneront plus tard. Pourront-ils rouvrir leurs images quand leur Photoshop sera désactivé ou sont-ils condamnés à rester liés à Adobe ? En tant que débutants, nous les encourageons à utiliser les ressources non destructives de Photoshop et à enregistrer dans son format spécifique, afin de pouvoir reprendre à tout moment leurs retouches au fur et à mesure de leurs progrès. Cette pratique pourrait être remise en question.

Nous sommes donc amenés à rouvrir la question que nous avions close en 1998 : existe-il des alternatives viables à Photoshop, que nous pourrions utiliser et conseiller aux débutants dans nos formations à l’image numérique ? Il y a eu du neuf en 2016. Au moins deux logiciels existent qui remplissent le cahier des charges donné plus haut, qui ne sont pas chers, moins de 100 €, qui sont acquis à titre définitif , et qui, en prime, ouvrent la plupart des images de Photoshop (seuls les calques d’objets dynamiques ne restent pas fonctionnels une fois ouverts) : Affinity Photo et PhotoLine . Nous avons fait une petite présentation du premier lors de notre dernière réunion numérique.

Dans les deux cas, il s’agit de logiciels très ambitieux. A en croire leurs auteurs, ils pourraient faire tout ce que demande un amateur éclairé, voire exigeant, peut-être pas avec le même confort d’utilisation que Photoshop, mais vu le prix… Mais est-ce bien vrai ? J’ai commencé à explorer le premier comme le ferait un néophyte. Il y a clairement des lacunes ou des imperfections, mais on en est encore aux toutes premières versions du logiciel et on peut espérer qu’il ne s’agit que de problèmes de croissance, que les versions suivantes devraient résoudre.

A suivre, donc. Il va ensuite y avoir du pain sur la planche pour les animateurs : si nous en adoptons un, il faudra réorienter toutes nos actions de formation autour de ce nouveau logiciel. Sans pour autant abandonner Photoshop, notre MOOC étant venu à point nommé pour pérenniser nos formations antérieures.

Charles Vassallo, mars 2017

 

 

Enregistrer

De la beauté …

« De la beauté, semblait dire le monde, et, comme pour le prouver (scientifiquement), de tous les objets qu’il regardait, maisons, balustrades, antilopes tendant le cou au-dessus des grilles, la beauté jaillissait à l’instant. Regarder une feuille qui tremblait dans le souffle de l’air était une joie exquise. Haut dans le ciel, les hirondelles plongeaient, s’écartaient, se jetaient à droite, à gauche, tournaient en rond, en rond, toujours avec un ordre parfait comme si elles étaient attachées avec un élastique, et les mouches montaient et descendaient et le soleil touchait tantôt une feuille, tantôt une autre, éclaboussant d’or clair, par bonne humeur, pour s’amuser, et de temps en temps un carillon, peut-être une trompe d’automobile tintait divinement contre les brins d’herbe, tout cela, si calme et raisonnable composait des choses ordinaires. C’était la vérité ; la beauté, c’était à présent la vérité, la beauté était partout. »

– Mais que t’arrive-t-il, la froidure modifie-t-elle ta raison ? Tu avais prévu d’écrire un édito et voilà que tu nous fais lire un texte de littérature ! Où veux-tu en venir ?
– Et bien, en écoutant cet extrait du livre « Mrs Dalloway » de Virginia Woolf [1925], plein d’images me sont apparues ; le Regent’s Park au centre de Londres et son zoo sans les antilopes, disparues… mais j’ai surtout été touché par le pouvoir des mots évoquant des objets, des mouvements, des lumières, des sons, des sentiments…
– Mais quel rapport avec la photo ?
– Justement, j’aurais aimé partager ce moment et l’immortaliser en prenant une photo. Plan large au 21 mm, sous un arbre, en contre-plongée, un premier plan sur les feuilles inondées de soleil, le ciel et les hirondelles qui tournent en rond et en arrière-plan, repoussées au loin par la focale, les maisons de Londres autour du parc.
– Tu n’as pas tout mis, relis …
– Normal, j’ai cadré !
– Et alors, cette photo, tu penses que si tu la montres à quelqu’un, il revivra « la joie exquise » que tu as ressentie ?
– Peut-être ! ou alors je peux mettre un titre ?
– Donc, tu admets que ta photo, seule, est incapable d’être la « beauté » dont parle l’auteur. Tu penses qu’il faut aider le spectateur à voir ce que tu ne lui montres pas en rajoutant un titre !!! Ton titre, il devrait alors être aussi long que le texte. Imagine que tu exposes dans une galerie, il y aura plus à lire qu’à voir ? Super !!!
– Non, ce n’est pas ce que je veux faire, l’émotion que j’ai ressentie au moment de la prise de vue, je resterai toujours le seul à l’avoir enregistrée dans ma mémoire, mais je te rappelle que j’ai cadré ma photo au moment de la prendre, je n’ai pas fait un panoramique à 360° pour montrer tout ce que je voyais, j’ai « choisi » un cadrage, j’ai déclenché au moment où les hirondelles rentraient dans le cadre, j’ai attendu que la lumière ne soit pas en face de mon capteur pour ne pas brûler l’image…, j’ai ….
– Ça va, tu es un bon photographe, mais c’est quoi ton titre alors ?
– Regent’s Park, 2017
– Le lieu, l’année … c’est facile, mais tu n’as pas répondu à ma question, ton titre ne me donne aucune précision sur ce que tu souhaites transmettre par ta photo.
– Et si je mets « beauté III », imagine que j’ai fait une série « beauté I, beauté II » …
– Ah ! et bien là, tu admets que ta photo seule n’a pas été capable de suggérer ce qualificatif  !!
– Tu m’énerves, je vais l’appeler « Sans titre III », tu es content ?
– Pendant que tu y es tu peux bien ne pas lui donner de titre, regarde l’exposition de l’Imagerie en ce moment – Being Beauteous – non seulement aucune des photos exposées n’a de titre, mais en plus, tu ne sais même pas qui a fait la photo ! Sur chaque mur, les quatre photographies ne mentionnent pas leurs auteurs. Si tu regardes attentivement tu peux reconnaître le style de l’un d’entre eux, mais, tu peux te tromper. C’est une scénographie un peu inhabituelle, les photos ne fonctionnent pas comme entité attachée à un auteur mais par la variété des présentations, les photos des quatre auteurs dialoguent entre elles. Allez voir, vous me direz votre avis.
– OUI, tu as raison, je peux ne rien écrire du tout, cela signifie que je respecte le spectateur, je ne lui impose pas ma vision, mon image lui parlera avec sa propre interprétation, ses références culturelles.
– Donc, si je te suis, pour notre salon de fin d’année, nous avons gagné les deux pages imprimées du catalogue avec la liste des auteurs et les titres de leurs photos, il suffira de placer les numéros sur les photos et les 1750 visiteurs – ou plus cette année – choisiront leur tiercé, certains ne pourront plus voter pour leur copain, les autres découvriront le nom des auteurs du tiercé gagnant en lisant la presse …
– C’est un peu extrême comme position, notre égo de photographe amateur en train de devenir auteur par la grâce de cette exposition dans les murs prestigieux de l’Imagerie va en prendre un coup !!!
– Donc le sujet est clos mais, quand même, certains disent que le deuxième auteur de la photographie c’est le spectateur, n’est-ce pas un peu exagéré ? et les droits d’auteur, ils doivent être versés à qui ? Pour nos visiteurs du salon, il faut leur rembourser l’euro du tiercé, c’est vraiment pas cher payé, en plus c’est trois photos qu’ils choisissent !!!
– Tu n’es pas sérieux, tu tournes tout ce que je dis en dérision…
– Non.
– Si.
– Non, je réfléchis, tu ne peux pas faire comme si tu ne photographiais que pour toi, tu les montres, tes photos ; que ce soit, sur Instagram, Flickr, aux réunions tirages papier du club, au salon de fin d’année. A chaque fois, tu t’adresses à une « cible » comme on dit en communication et tu dois te conformer aux usages des médias que tu choisis. Si tu veux que tes photos disparaissent au milieu des centaines de millions de photos d’Instagram, tu peux, ne pas les nommer, ne pas choisir de mots-clés ….
– Enfin, je ne respecte pas mon spectateur si je lui donne une liste de mots-clés comme titre, c’est du genre, regardez les hirondelles, les arbres, les feuilles … et pourquoi pas rajouter soleil – ciel – bleu –maisons, n’importe quoi !!
– Non, tu peux ajouter un titre qui peut même être incorporé à ton image, les mots-clés c’est pour le référencement Google. Comme titre, tu verras apparaître « mélancolie » enfin… non, les jeunes qui utilisent ces médias ne savent pas ce que c’est, plutôt « tout seul » ou, par exemple, « mort de rire » ….
– Oui et en plus pour faire croire qu’ils sont de vrais photographes, des auteurs, ils rajoutent « NO FILTER » ce qui prouve qu’ils sont capables de faire des images « fantastiques » sans utiliser la panoplie de filtres prêts à l’emploi de certaines applications.
– Bon d’accord, mais nous, nous parlons de photos imprimées, et tu remarqueras que lors des réunions tirages papier organisées par Jean Yves Le Pennec, personne ne rajoute un titre à ses photos, cela ne nous empêche pas de les commenter, même chose pour les images projetées du 2e mardi.
– Donc, nous aimons les images sans titre, nous laissons toute liberté au spectateur de construire son interprétation, d’évoquer des sentiments, des ambiances, des sons, des idées, des lumières, des sensations ….. en regardant nos photos ……

Et vous, vous auriez ajouté « Beauté » comme titre ?

Jacques Courivaud

De la beauté … Extrait de Mme Dalloway de Virginia Woolf [1]

Démarrer l’écoute à 25’43, version originale en anglais lue par Max Richter suivie de la traduction en français lue par Augustin Trapenard.

Texte original en anglais [2]
“Beauty, the world seemed to say. And as if to prove it (scientifically) wherever he looked at the houses, at the railings, at the antelopes stretching over the palings, beauty sprang instantly. To watch a leaf quivering in the rush of air was an exquisite joy. Up in the sky swallows swooping, swerving, flinging themselves in and out, round and round, yet always with perfect control as if elastics held them; and the flies rising and falling; and the sun spotting now this leaf, now that, in mockery, dazzling it with soft gold in pure good temper; and now and again some chime (it might be a motor horn) tinkling divinely on the grass stalks — all of this, calm and reasonable as it was, made out of ordinary things as it was, was the truth now; beauty, that was the truth now. Beauty was everywhere.”

Ronchoitise éditoriale de janvier

Ah ! Vous ne devinerez jamais ce que j’ai vécu pendant cette dernière quinzaine de décembre 2016 ! Le pire et le meilleur assurément. Je ne résiste point au plaisir de vous narrer mes improbables tribulations. Si vous ne m’avez pas beaucoup vu ces derniers temps, c’est que j’ai subrepticement changé de peau. Le chômage me guettant à OIT, j’ai endossé incognito le costume de Père Noël pour faire l’animation de Noël dans les rues de Lannion. J’ai donc débarqué en fanfare le 17 décembre sur le Quai d’Aiguillon. Tous les enfants étaient là avec leurs parents, sans oublier bien sûr les « Huiles » locales et les paparazzis qui mitraillaient à-tout-va. Bref, je n’avais jamais connu une telle gloire même si celle-ci n’était pas sans quelques inconvénients : des bisous à faire à des enfants pleins de barbe-à-papa, des autographes à signer en masse, des selfies en pagaille et une grosse hotte à porter, pleine de confiseries. Sans parler des lettres au Père Noël auxquelles il fallait répondre. Bref, j’étais débordé. Heureux mais exténué. Ainsi, la semaine passa et Noël arriva. Quelle ne fut pas ma surprise lorsque j’entendis nuitamment dans mon jardin des bruits suspects, comme des grelots, des pas d’animaux et des soufflements rauques. Prudemment, j’ouvris la porte et, dans la lueur blafarde de la pleine lune, je vis descendre d’un traineau tiré par des rennes, un homme en rouge de forte corpulence. Crénom ! Le Père Noël en personne. Il s’avança vers moi de son pas lourd et me héla. « Ah ! Gamin, j’ai besoin de toi. Je n’y arrive pas. Trop de boulot ce soir. Il va falloir que tu t’y mettes ». Je l’invitai à rentrer à la maison mais il protesta de sa grosse voix : « Pas le temps, gamin ! On a du taf. Enfile vite ton costume et monte. À nous deux on va sans doute pouvoir boucler la boucle. Encore 5.075.479 km à faire cette nuit. Faut pas traîner ». Hésitant, je commençai à tergiverser quand, un brin énervé, il me tendit le contrat que j’avais signé pour faire le Père Noël à Lannion. Et en petits caractères, en bas de page, il était bien stipulé que j’étais susceptible de faire quelques heures supplémentaires la nuit de Noël pour aider le vrai Père Noël à distribuer ses cadeaux. C’est ainsi que, tirés par six rennes hurlants et vigoureux, nous avons décollé dans le ciel étoilé de Noël. Ensuite, vous allez rire, je ne me souviens plus de rien. Sans doute un effet de la vitesse superluminique à laquelle nous avons filé pour délivrer nos 7.097.552.612 cadeaux à travers le vaste monde. Toujours est-il que le lendemain matin, je me suis réveillé, dans mon déguisement de Père Noël, au Centre-Ville de Lannion, au pied d’un grand sapin enguirlandé. À mon grand étonnement, les rares passants ne semblaient pas étonnés outre mesure de me voir là, en costume, errant dans un état second. Le jour de Noël, on ne doit s’étonner de rien ; ce n’est pas moi qui vous dirai le contraire. Et la suite allait encore confirmer avec éclat cette vérité universelle.  Désœuvré et un brin paumé, je décidai de rentrer à pied chez moi, sur les hauteurs de Brélévenez. La fête était finie et la magie allait retomber comme un pauvre soufflé essoufflé. Essoufflé, je gravis donc à grand peine les 142 marches de la « colline de la joie » et arrivai devant ma maison. Une atmosphère bizarre et indéfinissable régnait autour de mon domicile plongé dans l’obscurité. Je poussai la porte et franchis le seuil du salon. Et là, subitement, la lumière s’alluma partout dans la pièce et je vis, éberlué, devant moi, une horde d’amis s’égosillant d’un tonitruant « Joyeux anniversaire, Théophile, joyeux anniversaire … ». Oups ! Je faillis en avaler ma barbe blanche postiche. Le choc était si énorme ! Je réalisai soudain que c’était bien en effet mon anniversaire aujourd’hui mais je ne m’attendais pas à un tel comité d’accueil à la maison. À peine remis de mes émotions, ce furent des embrassades pendant de longues minutes. Les bouchons de Champagne sautèrent en rafale et les bulles coulèrent à flot. Ils étaient tous là, mes bons amis : Sylvie Triol (ex Sylvie Père et ex Sylvie Nègre), Jean-Bâ Lenn, Parfait Saint-Surcinq, Ignace de Grandjoie, Anne Aunyme, et Jean Passe. Puis vint le moment de la remise du cadeau de Noël/Anniversaire. Un grand silence se fit ; on tamisa la lumière et Sylvie (ma douce Sylvie), me tendit une enveloppe bigarrée qu’il me fallut décacheter. Ce que je fis, non sans appréhension. Le contenu de ce pli me laissa sans voix : il s’agissait d’un bon pour un tour du monde d’un an par tous les moyens de locomotion possibles ; une sorte de carte inter rail à l’échelle mondiale. C’était trop ! « Mes bons amis, comment vous remercier leur dis-je, la larme à l’œil ». « Eh bien, c’est très simple me répondit Parfait d’un ton assuré : il te suffira de nous envoyer chaque mois une carte postale de là où tu seras. Ce sera notre récompense ». Je leur promis de le faire et la matinée se termina dans un véritable bain de bulles et de fous rires. Nul ne s’inquiéta cependant de ce que deviendrait le club en mon absence mais j’avais le sentiment que les membres d’OIT avaient désormais (presque) tous vaincu leurs complexes devant l’art photographique. Ronchoit pouvait donc s’éclipser un moment sans mettre le club en péril. Voilà résumé le récit de ces jours mémorables et incroyables. Au fil des jours, j’avais fini par douter de la réalité de mon petit trip spatial avec le Père Noël ; j’avais dû rêver, boire un peu trop sans doute et partir « en live ». Jusqu’au jour où je reçus une petite carte de vœux au cachet illisible libellée ainsi « Merci gamin pour ton coup de main au Noël dernier. Repose-toi bien et bonne année à toi – Signé – Le Père Noël ». Ami photographe, même si c’est trop pour toi, tu n’as pas le choix, il faut que tu croies en Ronchoit… Bonne année !

Théophile Ronchoit

50 ans et toujours jeune

C’est en 1966, que quelques-uns des pionniers du tout nouveau Centre d’Études des Télécommunications à Lannion fondaient notre Photo-Club, nous étions à cette époque le Photo-Ciné-Club des P.T.T. de Lannion.

De 1966 à 1982, le club fut sous la présidence de Georges Daniel puis de Charles Vassallo. À cette époque nous avions déjà un Salon annuel, qui se tenait à la Mairie de Lannion.

En 1970, l’exposition se tenait du 5 au 13 décembre et nous avions de très nombreux clubs, venus de tous les coins de la France, qui exposaient à nos côtés.

scan165

scan165-copieParmi nos membres qui présentaient leurs photos cette année-là, des noms toujours présents dans notre club aujourd’hui, Henry Jacq, Claude Rougerie.

C’est alors que Jean Bichet, un photographe renommé qui venait de s’inscrire au club, proposa de de lancer l’Imagerie et les Estivales du Trégor — avec l’idée de lancer un pont entre les amateurs et les «pros» —, avec l’appui de la ville de Lannion. Nous avons alors suspendu notre Salon pour participer à ces premières années de l’Imagerie.  C’est pour cette raison que, si nous avons 50 ans cette année, notre salon n’est que le 46e.

Charles passa la main, et la présidence en 1982, et ce fut Bernard Moreau qui donna un nouvel élan au club en relançant, quelque temps après la tradition d’un salon de fin d’année de notre club. C’est aussi lui qui noua, avec des clubs européens, les contacts qui sont à la base du nouveau Salon que nous tenons encore aujourd’hui.

Des années 87 à 96 après le départ de Bernard Moreau pour prendre la suite de Jean Bichet à l’Imagerie, Michel Dontenwille, puis Dominique Pavy lui succédèrent.

En 89, le club, très actif, exposait deux fois, en janvier et novembre/décembre avec, dans la salle de conférence Jean Savidan, une journée rencontre, qui était même proposée, avec discussions avec les membres et projection de films super 8, diaporamas et diapositives.

De nouveaux noms connus aujourd’hui, exposaient : Catherine Épivent, et Pierre le Cabec, présent au catalogue, mais qui exposait déjà en 77.

Le 7 mars 1994, notre club changeait de nom et devenait Objectif Image Trégor.

Et notre salon de 94 était le 24e salon du Photo club des PTT de Lannion Objectif Image Trégor.

scan168

Nous avions trois invités d’honneur étrangers, deux d’entre eux, Camera 83 et Midfynn ont été encore récemment nos invités. Nous exposions au Centre Savidan à l’époque.

Nous y retrouvions d’autres noms comme Patrick Royet et Dominique Pavy. D’autres noms de membres bien connus que je ne donnerai pas, apparaissent aussi, ils n’ont quitté le club que depuis très peu de temps. Toujours pas de thème pour ces salons.

En 96, la présidence fut occupée par Pierre Le Cabec. C’est à cette époque que le club se rapprocha d’avantage d’Objectif-Image (l’Union nationale des clubs PTT créée en 1975) avec une participation régulière à ses différentes manifestations et de nombreuses récompenses dans ses Salons ; c’est aussi l’époque de la montée en puissance du groupe cinéma-vidéo.

N’ayant pas le catalogue de l’année 2000, je ne peux affirmer que c’est seulement en 2001 qu’un thème pour notre salon fut choisi pour la première fois, mais sur ce catalogue 2001 le thème était « La transparence »

Daniel Collobert succéda à Pierre en 2007, il quitta la présidence au bout de dix ans de présence au sein du CA, mais continue à être très actif au sein du club, bien que maintenant il ait aussi rejoint l’équipe de l’Imagerie.

Et me voici à ce poste, que j’occupe depuis l’année dernière, bien entourée par un CA actif.

Si j’ai cité les noms des présidents, et de quelques membres ayant leurs noms dans les catalogues, c’est parce qu’il était plus facile de citer ces quelques noms. Mais le club c’est tous les membres du club, animateurs bénévoles ou membres, qui au cours des années ont organisé ou participé à toutes les activités, sorties, stages, concours. Tous les ans, de jeunes photographes nous rejoignent. Nous essayons de faire évoluer le club, de donner à tous la possibilité de créer, de s’améliorer.

Vieux à 50 ans ?           Ah non !

Dany Corriez Jerphagnon

PS : Précision de Charles Vassallo :Lors du lancement des premières Estivales, l’Imagerie était animée par Jean Bichet et un de ses amis photographe parisien, Bernard Chevalier ; Alain Gouriou apportait le soutien de la ville ; côté club, il y avait Michel Viala — et moi en élément de décor ; Bernard Moreau est arrivé plus tard. Plus quelques bonnes volontés «extérieures» comme Patrick Le Bescond, alors menuisier et simple photographe amateur, pas encore patron des éditions Filigranes

 

J’aime, j’aime pas

L’appréciation esthétique d’une œuvre, quelle qu’elle soit, photographique, plastique, acoustique, est une affaire de goût, dit-on. Mais des goûts et des couleurs, on en discute beaucoup. Et si cela commence souvent par « j’aime » (ou « je n’aime pas »), on en arrive rapidement à développer le sentiment, pour le justifier, selon tout un ensemble de critères. Au risque de se faire censurer par un modérateur ganache.

Il y a dans les objets certaines qualités qui suscitent des réactions esthétiques. L’homme est un animal qui, dans la gamme de ses comportements, a, en certaines circonstances, des conduites qui sont appelées communément esthétiques et que l’on retrouvera, d’ailleurs, chez nos cousins non humains et chez des oiseaux bien de chez nous.

Je reviens d’un voyage d’étude sur la planète Mars, où j’ai pu approcher monsieur Ronchoit, cet auguste personnage qui a là-bas le grade de critique d’art interplanétaire de septième échelon, alors qu’il discutait âprement de théorie formelle de l’esthétisme avec messieurs Bennet et Kolmogoroff. J’ai retenu de ces débats que la théorie mathématique du beau est en marche, je vous en dirai quelques mots un autre jour.

Le sujet de ce voyage n’a aucune importance ici, mais je voudrais relater l’expérience troublante que j’ai vécue lorsque, dans un musée réputé, je fus mis en présence de mon premier Glux et que l’on me demanda : « comment tu trouves ? ». Il ne me fallut que quelques instants pour plonger au plus profond de moi-même et en revenir avec un avis sincère : « j’aime ». « Mais encore ? » me demanda alors mon ami martien. Je dois avouer que je restai sec, mais je décidai in-petto de maîtriser le sujet.

Il faut vous dire qu’un Glux se présente généralement sous une forme ovoïde, plate ou rondouillarde, ce peut être grand, très grand, ou suffisamment petit pour être porté en médaillon. Normalement il y a des couleurs, une norme que les artistes très contemporains essayent de contourner. C’est muni d’appendices plus ou moins longs, éventuellement flexibles mais ce n’est pas obligatoire.

Le Glux existe depuis la nuit des temps et l’on en retrouve dans des grottes d’avant l’histoire, datant de plusieurs dizaines de milliers d’années, preuve s’il en fallait de l’universalité du sujet. Les exégètes de l’art du Glux soulignent d’ailleurs les traits remarquablement modernes de leur facture.

Or donc, vexé d’être resté sec devant cette merveille, j’entrepris de travailler un peu. Très vite je me suis rendu compte que le fait d’augmenter mon vocabulaire me permettait en retour de saisir quelques subtilités que l’artiste avait mises dans son œuvre. Filament, barbille, fibre, vrille, mèche, cirre, appendice, antenne, filet, corde, poil, soie devinrent des mots que je pouvais accoler pour donner plus de force à mes propos avec long, court, flexible, sensible, vibrant, aimable, délicat, nerveux, fragile, charnel, gracieux, distingué, raffiné et même exquis en complément d’attribut. Muni du vocabulaire adéquat, peinturluré d’un peu d’histoire de l’art Gluxien à travers les âges, je pouvais maintenant tenir conversation dans les vernissages tout en déambulant un verre à la main : « j’aime parce que l’on sent que les cirres vibrent de façon exquise mais un peu charnelle ». Cela pose son humain.

J’eus cependant beaucoup de difficultés, voire même un revers, avec cet artiste qui exposa des Glux tout plats et tout blancs. Mais il disposait d’un vocabulaire plus riche que le mien et dans lequel il y avait des mots que je ne comprenais pas, comme « l’art qui interroge » ou « le concept prime la réalisation » ou encore « c’est processuellement discursif ». Un jour, je rencontrai la célébrité qui présentait des Glux bleus et ce fut un naufrage. J’eus beaucoup de peine à comprendre ce que je voyais, pourtant les experts certifiaient que la démarche était tout à fait géniale, puissante et intemporelle, la preuve en est que même le type de bleu (International Bleu Gluxklein) était breveté. Je compris que je n’étais pas encore à la hauteur même si je restais intimement convaincu que cet art là était, à tout le moins, saugrenu.

Mais très rapidement cette situation me sembla un peu vaine, aussi je trouvai un maître Glux qui m’enseigna son art. L’art s’apprend à tous les sens du terme : on apprend à en produire, on apprend à le goûter. Ce fut un vrai travail, ce fut long, ce fut fatigant, ce fut une révélation : l’art existait vraiment. Je découvris qu’il y a intrication du jugement esthétique et des expériences de sa propre vie.

Mon expérience du Glux m’apporta la preuve que David Hume avait raison « La beauté n’est pas une qualité inhérente aux choses elles-mêmes, elle existe seulement dans l’esprit qui la contemple, et chaque esprit perçoit une beauté différente ». Autrement dit, le Beau pour le hibou, c’est la chouette.

Nos précieuses images numériques

 

Sans nom 1

Ce soir, en faisant la sauvegarde de mes données, je me suis posé la question du devenir numérique de mes photographies.

Pour mes photographies argentiques, je ne me pose pas vraiment la question, j’ai accepté la lente dégradation de la chimie. Néanmoins mes yeux me permettent encore de « comprendre » mes vieilles images.

Comme beaucoup, lorsque le numérique est arrivé, je me suis dit : « super je garderai mes images une éternité », vivrai-je une éternité ?

Alors revenons à ma question du soir : comment faire pour garder mes photographies numériques le plus longtemps possible.

Je me suis posé quelques questions :

L’archivage physique, numérique et logiciel de mes données. Dans quelques décennies, si nous n’avons pas pris soin de migrer nos données, nous rencontrerons les problèmes suivants : arriverons-nous à relire nos anciens disques durs, il nous faudra le bon connecteur, le bon pilote de périphérique pour monter la ressource et le bon pilote pour que le système accède à l’organisation logique du disque dur, tout du moins si celui fonctionne toujours.

Puis il faudra le logiciel capable de lire les données brutes et peut-être de retrouver les corrections effectuées à l’époque, tout cela fait beaucoup.

Une autre méthode, conserver la machine avec les logiciels. Cette solution risque de transformer nos garages en musée des dinosaures morts de l’informatique.

Alors quelle solution ? Je me lance donc dans une recherche sur internet, avec, je le précise, une haute opinion de ma production, que j’envisage de léguer aux générations futures (le gars ne passe plus à travers les portes).

La définition professionnelle proposée, pour les archives image et audiovisuelle, par le groupe de travail Audiovisual Archiving Philosophy Interest Network (AVAPIN) et l’UNESCO, en 1998, est « Constituent des documents audiovisuels les œuvres comprenant des images et/ou des sons reproductibles réunis sur un support matériel dont : l’enregistrement, la transmission, la perception et la compréhension exigent le recours à un dispositif technique ; le contenu visuel présente une durée linéaire ; le but est de communiquer ce contenu et non d’utiliser la technique mise en œuvre à d’autres fins ».

Bon c’est bien de mettre une définition, mais maintenant que faire ? Je continue ma recherche… puis je tombe sur une thèse sur la conservation des fichiers numériques dont voici un paragraphe des plus intéressants :

« Une sélection de l’information par le contenu

Il ne sera pas question dans ce rapport de chercher à conserver à tout prix toutes les informations que chacun d’entre nous produit ou consulte, y compris des données d’intérêt momentané. Nous partirons du principe qu’une sélection est nécessaire dans le choix de celles qui ont réellement besoin d’être préservées à long terme. De façon très générale, on peut en simplifiant distinguer deux catégories d’informations :

  • celle qui prend un intérêt croissant dans le temps, ou du moins garde un intérêt constant ;
  • celle qui peut être importante pendant quelques temps, mais dont l’intérêt diminue et va s’effacer progressivement (ou même rapidement) au cours du temps. »

Quelle horreur, je comprends enfin que mes photographies n’auront pas un intérêt ad vitam æternam !!!

Il est tard et je me dis qu’il faut faire au mieux pour mes sauvegardes du moment, multiplier les disques durs, les lieux de stockage, vérifier régulièrement mes sauvegardes, en espérant qu’un incident mécanique ne survienne pas, qu’un logiciel malveillant ne se glisse pas dans mes données ou tout autre événement indésirable.

Voilà, je pars me coucher sans réelle réponse à ma question, mais vous l’avez peut-être.

Stéphane Pareige

« Le support photographique »

Qu’est-ce que le support photographique ? En cherchant sur internet, la principale définition qui ressort est «un support de photo est le matériau sur lequel est fixée l’image finale, accrochable en cimaise : papier, carton, métal, plexiglas, etc, qui est lié au procédé de transfert du cliché : papier sensible, impression, etc».

La photographie a utilisé des supports variés, plaque d’étain de Niepce, plaque de cuivre de Daguerre, la plaque de verre et le film souple. Les photographes ont toujours inventé, amélioré ou utilisé les moyens techniques de leur époque, c’est une évidence.

Aujourd’hui le numérique a fait son apparition dans l’ensemble des foyers. Nos images sont stockées sur des disques, voir sur le «Cloud» et en tout cas totalement numérisées et dématérialisées. Nous scannons même nos anciennes photographies, souvent avec le vain espoir de les transmettre à la postérité.

Est-ce que la photographie est devenue un «art numérique» par opposition à un «art chimique», est-ce le combat des anciens contre les contemporains ? Il s’agit peut-être simplement de partager avec les autres notre vision d’une scène.

La technique des 20e et 21e siècles a apporté d’autres modes de visualisation des informations autrefois stockées sur le papier. Nous voyons autour de nous des liseuses numériques pour les livres, l’écran de tissu du projecteur de diapositive est remplacé par un écran informatique. Les objets devenus courants tels que nos téléphones disposent eux aussi d’écrans de plus en performants.

La dématérialisation des œuvres d’art est devenue courante et nous sommes de plus en plus à les consulter sur nos écrans.

De mon point de vue, la question se pose, le tirage papier est-il le support final de toute photographie de qualité, ou devons-nous réfléchir à d’autres modes de visualisation, eux aussi de qualité, de nos images ?

Je rêverais de visualiser mes photographies en 3 dimensions, en une version très améliorée des hologrammes. Nous pourrions tout simplement regarder nos photographies en famille ou avec nos amis sur un écran «haute définition» parfaitement calibré.

Nous pourrions regarder des «œuvres virtuelles», nos photographies, sur des supports physiques, nos écrans.

Allez, tout cela n’est que pur délire et prouve que nous sommes libres de choisir la destination de nos photographies et les modes de diffusion ; à moins que nous devions nous adapter à ceux qui les regardent et qui les aiment.

Sur ce, je vous laisse, je pars lire un livre papier.

Stéphane Pareige

Photo ….Photophones…. l’avenir ???

Depuis quelques années on entend parler de selfies, des autoportraits, égoportraits comme le disent si bien nos amis canadiens.

Je ne parlerai pas de ce phénomène, cela a déjà été traité et si ces photos sont souvent amusantes, je ne suis pas sûre que la qualité soit au rendez-vous. Mais ce n’est pas non plus le but de ces images qui sont surtout faites pour être envoyées, vite fait, à des amis, garder le souvenir d’un moment, ou même situer, avec le GPS intégré, un lieu.

Or, je lisais un article, dernièrement, qui parlait de photographie avec un smartphone, et cela parlait réellement de photo. On ne peut dire «la vraie photographie», car qui pourrait dire ce qu’est la «vraie photographie». Cela parlait d’un style de photo plus proche de ce que l’on peut faire avec un appareil photo traditionnel.

Parlerons-nous de téléphones pouvant faire des photos ou d’appareils photo permettant de téléphoner ?

Trouver un nouveau nom, cela, c’est déjà fait, puisque ces appareils, déjà plus performants que les téléphones permettant de faire des photos, sont appelés « photophones »

Il faut bien constater qu’il y a une grosse différence de qualité d’image entre les téléphones d’entrée de gamme et ces appareils plus perfectionnés, qui remarquons le au passage, coûtent le prix d’un bon petit appareil photo.

Ces derniers, dont les performances sont comparables à celles des compacts récents et même parfois supérieurs aux plus anciens reflex, présentent cependant quelques lacunes, principalement dans leur ergonomie.

La prise en main pour la photographie n’est pas aisée et souvent leur réactivité pas toujours très rapide. Entre le moment où l’on choisit de photographier et le résultat qui s’affiche, trop de temps s’est passé, du coup le résultat est décevant (sujet absent, moment dépassé, flou de bougé important). Et je ne parle pas du temps qu’il faudra pour réveiller l’appareil si l’on a activé un code de verrouillage.

L’autre problème est la taille du capteur. On l’a souvent répété, ce n’est pas forcément le nombre de pixels qui compte, mais la taille des photosites, et dans ce cas, la taille est pratiquement dix fois plus petite que sur un reflex pro. Qui dit petits photosites, dit moindre qualité de ceux-ci.

Résultat : difficulté pour traiter des sujets sombres ou trop clairs.

Mais la taille du capteur induit aussi que les objectifs sont de courte focale avec une très grande profondeur de champ. Obligation de se rapprocher des sujets, d’où déformation des perspectives quand on est près de son sujet.

(On parle de l’arrivée prochaine sur le marché d’appareil à objectifs multiples).

Et pourtant malgré toutes ces contraintes techniques, les automatismes permettent de faire des photos réussies.

Certains d’entre nous font encore une grosse crise d’allergie quand on leur parle de ces photos sorties de téléphones. Indignes d’un vrai photographe, de qualité médiocre, pensent-ils, sans se rendre compte qu’ils n’ont peut-être pas tout vu, car il en est de la photographie avec des smartphones comme de la photographie avec un appareil photo : si la qualité de l’appareil est un plus, c’est l’œil de celui qui le tient qui fera la qualité de la photo. Je ne parle pas de technique dans ce cas.

Quoi que …

Les contraintes techniques de ces nouveaux appareils obligent aussi à des techniques de prises de vue différentes. Certaines, de base sont les mêmes que pour n’importe quel appareil, quand on manque de lumière penser à prendre un appui pour limiter le bouger, se rapprocher des sujets à photographier, etc, d’autres pas.

Mais ces photophones ont quand même un autre avantage : on a tellement l’habitude de voir des téléphones dans toutes les mains, qu’il est facile de faire des photos discrètement (penser à débrancher les alarmes visuelles ou bruits quand même). Assis sur un banc ou dans la foule, on est l’anonyme qui regarde ses messages et l’on peut photographier sans se faire voir.

Cependant, ce n’est pas parce que ces appareils sont automatiques qu’il ne faut rien faire. Les post traitements sont toujours aussi utiles si l’on souhaite présenter des photos de qualité.

Alors est-ce que l’avenir de la photographie est dans le photophone ???

Comme on dit « seul l’avenir nous le dira ».

                                                                            Dany Corriez Jerphagnon

Dans ce texte, j’ai « zappé » beaucoup de possibilités d’utilisation de ces appareils, HDR et autres possibilités de réglages, car il ne s’agit pas ici de vous faire un cours.

Ceux intéressés au club pourront se renseigner ou, par exemple, lire l’article qui est consacré à la «Photographie au smartphone» dans la revue Chasseur d’Image du mois d’avril. Ceux qui les utilisent déjà sont invités à apporter des photos lors de notre réunion mensuelle, et nous montrer ce que l’on peut faire avec ces appareils.